Je danse.

Je danse jusqu'à l'étance. Je danse jusqu'à secouer. Hors de moi. La solitude. Le néant. La peur. La tristesse. Je les secoue. Hors de moi !
Je danse. Je danse, jusqu'à l'étance. Vous m'entendez ? Oui ! Je serai !
Je mérite ma place dans l'être. J'existe. Merde. J'existe.
J'existejexistejexistejexiste. Je danse. Donc je suis.
Je les vois, les valentines, les coeurs ardents. Je les vois, les roses sur le pavé. Je les vois. Les bières, le vomi. Je les vois. Et merde. Je me vois, nonne retirée dans sa cellule. Si j'étais elle, au moins. Cette nonne retirée dans sa cellule. Il y a de l'austérité, de l'étance en cette nonne. Retirée dans cette cellule. Au lieu de ça - non. Au lieu de ça, je ne suis... rien. Rien du tout, merde. Rien. J'en ai assez. Je suis un fragment. Là, un fragment inexistent, puisque personne ne me voit, et que j'en arrive à manger avec mes amis imaginaires. Alice, va te faire voir. Tu n'existes même pas.
Je me dépose, je m'explose, je m'exhibe, je prostitue mes maux. Je salis mon être, le brise en fragments, et les passants - tout dépent d'eux - s'en foutent, mais... putain... ils s'en foutent, complètement, éperduement. Ils passent, et puis s'en vont. Et je ne suis pas, en attendant, je ne fais partie de rien, d'aucun CERCLE, parce que j'ai passé ma putain d'existence à me disperser. Au lieu de me concentrer. Et de construire une chose, un être, à partir d'un noyau. Que l'arbre pousse. Rien. Pas d'arbre. Pas de nonne. Rien. Juste rien. C'est horrible, ce rien. Et là, je jure.
Je crache. Je danse. Je frétille. Je bouge mes cheveux, là, un coup de cheveux, dans le vent, je fouette le vent, avec mes cheveux, et encore un coup. Je danse. Jusqu'à l'étance. Pour que je sois. Un jour, je serai. Je serai... Moi. Sans dépendre d'eux, des autres. Parce que les autres s'en foutent. Je pourrais m'enfiler 10 schweppes. 20 schweppes. Putain d'amertume. Pas de cigarette. ça fait bien, mais je fume pas, non merci. Je danse. Et c'est bien comme ça.